Architecture militaire
Le plan régulier du château de Dourdan est caractéristique du système philippien
LE SYSTÈME PHILIPPIEN
De nombreux vestiges, témoins de l’époque philipienne, sont encore visibles
En matière d’architecture castrale, le règne de Philippe Auguste marque l’apparition d’une rationalisation tranchant sur les modes constructifs empiriques et créatifs du XIIe siècle. Ce roi et son administration introduisent dans le royaume le système philippien. Il fit école jusqu’au XVe siècle, bien au-delà des frontières du royaume.
Ce nouveau système défensif sert de modèles à de nombres de forteresses en France :
- des tours maîtresses : Rouen, Vernon, Gisors, Chinon, Dourdan, Villeneuve-sur-Yonne, Montlhéry…
- des enceintes castrales : Yèvre-le-Châtel…
Le château de Dourdan, l’une des dernières fortifications construites par le roi Philippe-Auguste, est l’expression la plus aboutie du système dit philippien.
En 1226, Robert III de Dreux fait ériger le château de Nesles-en-Tardenois (commune de Seringes et Nesles, département de l’Aisne), dont le plan est la copie exacte du château de Dourdan. Le donjon est également une tour d’angle isolée par son propre fossé.
Le système philippien est d’une grande simplicité
Les plans sont réguliers : carrés, rectangles ou polygones. Chacun de leurs angles est flanqué par des tours circulaires. Distantes de 30 à 60 m, elles permettent le tir de flanquement réciproque à l’aide des armes de place, tels les arbalètes ou les arcs.
Le château de Dourdan est l’un des seuls édifices d’Île-de-France qui ait conservé l’essentiel de ses structures défensives : fossés secs, courtines, tours, châtelet d’entrée et donjon. Un pont-levis et une herse assuraient autrefois sa défense. Des archères percées sur les flancs des tours sont encore visibles.
Lorsque le roi séjourne au château de Dourdan, il réside dans le logis royal situé autrefois le long de la courtine sud. Il subsiste un unique témoignage de ce bâtiment aujourd’hui disparu. Il est visible sur la célèbre enluminure du mois d’avril des Très Riches Heures du duc de Berry (vers 1410).
Le château médiéval du Louvre
Le plan du premier Louvre est de type philippien. C’est un carré à quatre tours d’angles et une tour intermédiaire par face, ceint d’un fossé à escarpe et contrescarpe maçonnées. Le plan se complète par une ou plusieurs portes, situées au milieu d’une des faces, pratiquées entre deux tours. Le système philippien s’adapte au monde féodal. Sa caractéristique est la généralisation de la tour maîtresse circulaire. La tour du Louvre à Paris, dont relevaient tous les fiefs de la couronne, en est le modèle.
LES ÉLÉMENTS REMARQUABLES
Le châtelet d’entrée
L’ouvrage d’entrée se compose d’un arc brisé, flanqué de deux tours semi-circulaires percées d’archères. L’entrée du château est assurée par des éléments d’arrêts défensifs : archères, assommoir et herse. Situé devant le châtelet, un pont-levis à flèches permettait le franchissement des fossés secs. Ce pont-levis est remplacé en 1742 par un pont dormant en pierre.
Les tours
Les murailles sont défendues par les courtines crénelées et par neuf tours circulaires : quatre tours aux angles, trois tours médianes et deux tours jumelles pour le châtelet. Elles sont toutes plus larges à leur base grâce à un talus externe plein construit en grès pour éviter la sape. Chacune possédait au moins deux niveaux voûtés sur croisées d’ogives. Leurs murs sont percés d’archères décalées de niveau à niveau.
Les tours crénelées étaient autrefois couvertes d’un toit, peut-être garni d’une ceinture de hourds en bois. L’équidistance des tours assurent une défense de l’enceinte tous les 20 à 30 mètres.
Le donjon
Le donjon du château de Dourdan a la particularité d’être situé dans un angle et isolé par son propre fossé. Celui du Louvre se trouve au centre de l’enceinte du château fort. La tour philippienne de Dourdan possédait deux ponts-levis : un accès côté cour, un autre côté champs, assurant une défense autonome.
Symbole de pouvoir, la tour maîtresse ne fut jamais résidence du maître. De forme circulaire, autrefois haute d’une quarantaine de mètres, la grosse tour servait de tour de guet. Sa partie supérieure comprenait des hourds, ainsi qu’un toit en poivrière. Des encoches pratiquées dans le mur sont encore visibles aujourd’hui. Ces trous de boulins supportaient l’échafaudage en bois lors de la construction du donjon. Les supports de pierre de la porte de l’escalier sont ornés de feuillages stylisés.
Les voûtes sur croisée d’ogives
La salle basse et la salle haute du donjon présentent des voûtes en croisée d’ogives. Ces éléments du style gothique sont des innovations techniques. Les voûtes portées par six nervures retombent sur des culots. Elles permettent d’accroître ainsi la hauteur des pièces et d’élargir les espaces intérieurs. Au croisement des nervures se trouve la clef de voûte sculptée de motifs végétaux. Ce type de décor apparaît sur la retombée des arcs, nommés culs-de-lampe. L’un deux, situé dans la salle haute, porte une sculpture d’homme grotesque et accroupi.